L'or d'Alexandre d'Oliver Delorme
FICHE
Titre: L'Or d'Alexandre
Auteur: Olivier Delorme
Catégorie: Thriller
Editeur: H&O
Nombre de pages: 441
ISBN: 978-2-84547-163-4
Après la parution de la "Quatrième révélation", le petit nouveau tant attendu est enfin sorti. Il s'intitule "L'or d'Alexandre", un roman dont le thème est basé sur un fait divers avec pour arrière plan la Grèce antique. Rien de surprenant vu que l'auteur lui-même est hédoniste et historien de surcroît.
Dans cet ouvrage OD cherche à captiver l'attention du lecteur à travers un dédale de manigances et de mystères tout en donnant à son récit une authenticité aussi proche que possible de la réalité. Mission réussie ? A vous de juger.
Je vous propose ci-après une interview de l'auteur au sujet de la genèse de cet ouvrage qui est fort intéressante.
1. Dans quelles circonstances avez vous écrit l'Or d'Alexandre ? Pourquoi ce sujet ? Qu'est ce qui vous l'a inspiré ?
OD:
Ce livre a une triple origine: une rencontre, un fait divers et une vieille histoire.
La rencontre s'est déroulée à la FNAC de Reims où j'étais invité par l'association Ex Aequo, pour la présentation de mon deuxième roman Le Plongeon (qui vient de ressortir en poche H&O) publié en 2002. Il y avait dans l'assistance un lecteur en fauteuil roulant qui a semblé extrêmement étonné, après la fin du forum, que je trouve le temps de parler avec lui, que je m'accroupisse pour mieux l'entendre en raison du brouhaha ambiant. J'ai compris plus tard qu'il était si souvent victime de discriminations de la part des "valides", qu'il avait redouté de ma part soit une fin de non-recevoir, soit quelques mots de compassion et une esquive.
Et j'ai réalisé alors que mon comportement, qui était pour moi le plus naturel du monde - échanger avec un lecteur -, lui avait semblé, à lui, exceptionnel.
Puis Michel Robert, à qui est dédié ce livre, est devenu un ami. Et plus je le connaissais plus je prenais conscience de ce que sa condition de tétraplégique et d'homosexuel impliquait, des obstacles quotidiens qu'il rencontrait, aussi bien matériels que dus au regard des autres, à leur indifférence, voire à leur hostilité. Aussi, petit à petit, la nécessité s'est-elle imposée à moi qui, dans chacun de mes livres, ai toujours voulu, à l'image de Voltaire, "écrire pour agir", de créer un personnage handicapé qui montre, à travers une histoire policière, un suspense que j'espère haletant, un regard ironique sur notre monde politique, tout ce que ma rencontre avec Michel m'a appris, ce que je ne voyais pas auparavant et dont j'ai pris conscience depuis.
La deuxième source de ce livre est un fait divers auquel je me suis intéressé ces dernières années. Il s'agit de l'arrestation et du jugement d'un conservateur en chef de Bibliothèque nationale de France, chargé des manuscrits hébraïques, et qu'on a condamné parce qu'il aurait lui-même volé et vendu certains des manuscrits dont il avait la charge. Au fur et à mesure que je lisais ce qui paraissait sur cette affaire, j'ai eu l'intime conviction que cet homme était innocent. Je ne sais si cela est vrai, mais ce que je sais, après cette affaire comme après celle d'Outreau, c'est qu'on a la fâcheuse tendance, au soi-disant pays des Droits de l'homme, à emprisonner, souvent dans des conditions honteuses, avant d'avoir jugé et de condamner de plus en plus facilement, sans preuves matérielles, à des peines de plus en plus lourdes. Bref, je crois que la procédure judiciaire que nous semblons incapables de réformer, jointe au système de la détention provisoire plus ou moins généralisé, à la condamnation en vertu d'une intime conviction, à l'état scandaleux de nos prisons et à un pouvoir de plus en plus autoritaire et de plus en plus démagogique qui voit dans des lois de plus en plus répressives la solution à tous ses échecs, sont un véritable cancer d'une démocratie française très malade et qui prend chaque jour plus de retard sur les pays qui nous entourent que ce soit en matière de droits des homosexuels, dans le refus pathologique de notre Nomenklatura politique de légaliser la fumette, comme partout en Europe, ou de reconnaître aux individus le droit de mourir dignement quand ils le décident.
Une des deux intrigues qui s'entremêlent dans L'Or d'Alexandre tourne donc autour de l'accusation portée contre une conservatrice du Louvre d'être le cerveau d'un trafic de tableaux (le trafic d'œuvres d'art rapporte autant, aujourd'hui, au crime organisé que le trafic d'armes ou celui de la drogue) prêtés par le Louvre pour des expositions à l'étranger et dont a découvert que certains avaient réintégré les réserves sous la forme de faux.
Quant à la vieille histoire, elle est racontée par de nombreux historiens de l'Antiquité. En 279 avant notre ère, des Gaulois commandés par Brennus déferlent sur la Grèce. Ils sont repoussés du sanctuaire de Delphes, mais réussissent à s'emparer d'une partie de ses richesses. Les dieux maudissent alors ce butin qui porte malheur à quiconque le touche, les Gaulois le rapportent néanmoins jusqu'à Toulouse, où les Romains le volent à leur tour en 106... Il disparaît pendant son transfert à Rome et moi, j'imagine dans mon roman qu'il réapparaît de nos jours et est acheté par le Louvre. C'est à cause de cet Or offert par Alexandre le Grand à l'Athéna de Delphes que plusieurs meurtres étranges seront commis. Je n'en dirai pas plus, mais cette deuxième intrigue qui s'imbrique à la première me permet aussi de parler de l'actuelle dérive commerciale de musées pour lesquels produire des ressources propres, valoriser leur fonds comme d'autres des actifs financiers, bref faire du fric, devient bien plus important que d'assumer les missions que leur assignait la politique culturelle... au temps où la France en avait une !
2. Quelles étaient les difficultés rencontrées durant sa rédaction et comment avez vous fait pour surmonter ces obstacles ?
OD:
Il y a eu quelques difficultés techniques, concernant les problèmes de faux et d'authenticité des objets d'art que j'évoque, mais ayant travaillé au Louvre il y a quelques années, j'ai recouru à l'aide et à l'expertise d'amis qui travaillent dans le milieu de la peinture et au Centre de recherche et de restauration des musées de France. Je les ai interrogés avant pour savoir si l'histoire que j'avais bâtie tenait la route, puis je leur ai fait lire mon manuscrit et l'ai corrigé en fonction de leurs remarques.
Pour le reste, les difficultés sont celles que rencontre tout romancier pour construire et conduire une intrigue. En ce qui me concerne, je ne me mets à écrire qu'en sachant comment commence mon histoire, comment elle finit et quelle va être sa structure. Cette fois, l'évidence s'était imposée à moi, qu'elle devait être racontée par deux voix différentes, celles de mes deux "héros". Mais au fil de l'écriture, les personnages qu'on a construits acquièrent une telle densité, une telle logique interne, qu'ils refusent parfois de faire ou de dire, ce qu'on avait prévu qu'ils fassent ou disent ; il faut donc s'adapter à eux pour aboutir là où l'on veut arriver. Et puis il y a le travail de documentation: j'évoque dans L'Or d'Alexandre la spoliation des collections juives par les nazis pendant la dernière guerre mondiale, le régime oustachi en Croatie, le rôle du Vatican dans l'évasion des criminels de guerre ou les turpitudes financières de la papauté... tout cela, naturellement, a nécessité un travail méticuleux, mais de formation , je suis historien: j'aime cela !
En fait, la principale difficulté a consisté à faire de mon personnage handicapé un vrai personnage. Je ne voulais surtout pas être dans le registre de la compassion. Je voulais créer un personnage de chair et de sang, contradictoire, avec de l'humour et de la mauvaise foi, amoureux et rempli de doutes, parfois furieux contre son corps, le destin, les autres - avec raison ou injustement. Je voulais en faire à la fois un personnage profondément humain et "moteur" de mon roman. Je ne voulais pas en faire une copie de Michel Robert - ce qu'il n'est pas -, mais j'avais besoin de Michel pour le rendre crédible, pour donner des détails vrais, parfois crus (qui peuvent être violents ou choquants pour tel ou tel) de sa vie. Et Michel a accepté de répondre à toutes mes questions, les plus ingénues comme les plus intimes, les plus indiscrètes. Chaque fois que je me trouvais dans une situation qui me posait problème, je décrochais mon téléphone. Chaque fois il a répondu avec la plus grande sincérité ; jamais il ne s'est dérobé. Puis je lui ai donné mon manuscrit à lire. Jamais je n'ai été aussi angoissé dans l'attente d'un retour de lecture: j'avais perdu deux ans et demi de travail s'il me disait que mon personnage était raté. Il ne me l'a pas dit et, comme je l'ai écrit dans ma dédicace, sans son amitié, son courage et sa confiance, mon Or d'Alexandre n'existerait pas.
Libellés : d, interview, murmures, Olivier Delorme, roman
2 Comments:
miam! tu m'as donné envie de découvrir ce livre, merci!
sinon mon carnet de lectures a une adresse différente depuis un bon moment :)
www.monblog.ch/speedy80
@Speedy80
Dis donc mais kess té perspicace ! OK cé changé.
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